Fiscalité

Traders, ce qui va changer pour vous en 2023

7 min read

Bien comprendre le nouveau régime
 

Depuis le 1er janvier 2023, le régime fiscal des traders de crypto a évolué du fait de l’entrée en vigueur de l’article 70 de la loi de finances pour 2022 qui prévoit que les « produits des opérations d’achat, de vente et d’échange d’actifs numériques effectuées dans des conditions analogues à celles qui caractérisent une activité exercée par une personne se livrant à titre professionnel à ce type d’opérations » sont imposables à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (article 92, 2, 1° bis du CGI). 

En suivant l’actualité crypto, on a beaucoup entendu qu’à compter du 1er janvier de cette année, les traders professionnels de crypto étaient imposables aux BNC. Or, cette affirmation est fausse ! 

En effet, le texte cité précédemment vise en réalité les personnes qui font ces opérations dans des conditions analogues à celles d’un professionnel. Ce qui n’est pas la même chose. Pour faire simple, vous pouvez agir « en professionnel » ou bien « agir comme un professionnel ». Agir en trader professionnel de crypto signifie que vous vous déclarez comme ayant une activité de trader crypto et que vous vous êtes immatriculé au registre du commerce et des sociétés à ce titre. 

Au contraire, lorsque vous agissez comme un trader professionnel, vous n’avez pas réalisé les démarches d’immatriculation, mais que les moyens que vous avez réunis pour réaliser cette activité sont similaires à celles utilisées par un trader professionnel. 

De là, il faut bien comprendre que l’article 70 de la loi de finances pour 2022 est venu en quelque sorte intercaler une situation entre celle du trader occasionnel et celle du trader professionnel qui est celle du trader habituel. Ainsi, ces trois situations relèvent d’un régime fiscal différent : 

 

Situation :

Trader occasionnel

Trader habituel

Trader professionnel

Régime fiscal : 

Plus-values des particuliers (art. 150 VH bis du CGI)

BNC

BIC

Cette modification de régime ne va pas radicalement changer radicalement l’imposition supportée par les traders de crypto. Toutefois, elles ne doivent pas non plus être négligées que ce soit sur l’application des règles de détermination de la base d’imposition que d’un point de vue procédural. 

Concernant tout d’abord la détermination de la base d’imposition, la base d’imposition des BNC est déterminée au moyen d’une comptabilité de caisse (on comptabilise les recettes effectivement encaissées et les dépenses effectivement décaissées), alors que la base d’imposition des BIC est déterminée au moyen d’une comptabilité d’engagement (on comptabilise les produits et les charges lorsqu’ils sont facturés, mais pas encore encaissés). Ainsi, la tenue de la comptabilité pour les traders habituels non professionnelle va s’en trouver simplifié. 

Concernant l’application du régime micro les traders relevant des BIC peuvent en bénéficier jusqu’à un seuil de 188 700 € alors qu’en BNC le seuil est de 77 700 €. L’abattement forfaitaire pour frais et charges est de 71 % pour les BIC alors qu’il n’est que de 34 % pour les BNC. Sur ce point, le changement de régime s’avère moins intéressant pour les traders habituels non professionnels, qui seront peut-être enclins à faire les démarches pour devenir professionnels. Il faudra tout de même faire attention aux conséquences de l’immatriculation en termes d’impact sur les cotisations sociales. 

Enfin, le changement a une incidence sur le traitement des déficits. En effet, dans le cas des BIC, les déficits sont imputables sur l’ensemble des revenus des contribuables dès lors que ces activités comportent la « participation personnelle, continue et directe de l’un des membres du foyer fiscal à l’accomplissement des actes nécessaires à l’activité » (article 156, I., 1° bis du CGI, BOI-IR-BASE-10-20-10 n°1 s.). Dans le cas contraire, le déficit n’est reportable que sur les BIC des 6 années suivantes. Maintenant, avec le passage aux BNC, les déficits des traders habituels seront reportables uniquement sur les 6 années suivantes. Ainsi le régime des BNC n’est pas forcément un cadeau surtout pour les traders qui sont en pertes sur une année d’imposition. 

Cependant à notre sens la vraie raison de ce changement est d’ordre procédural. La première chose à noter est qu’en reconnaissant en tant que tels les traders habituels non professionnels, il n’est plus possible de considérer qu’il y a une activité occulte en cas de non-déclaration des revenus. En effet, lorsque le contribuable exerce une activité considérée comme professionnelle, mais qu’il ne s’est pas immatriculé au RCS et qu’il n’a pas déclaré les revenus tirés de cette activité, on considère qu’il a une activité occulte. Et la reconnaissance du caractère occulte de cette activité permet à l’administration de rectifier les dix dernières années et d’appliquer une pénalité de 80 %. 

En reconnaissant cette situation intermédiaire, de trader habituel, l’activité occulte ne pourra plus être soulevée au titre des années ultérieures au 1er janvier 2023. En revanche, le risque reste réel pour les années antérieures.

Les traders doivent faire attention, car l’application du 150 VH bis conduit à ne pas faire de déclaration s’ils n’ont pas fait de retrait en monnaies fiat. De ce fait, on peut se retrouver dans la situation où le contribuable n’a rien déclaré se considérant comme occasionnel puis lors d’un contribuable, l’administration le considère comme professionnel et dans la mesure où il ne s’est pas immatriculé et qu’il n’a rien déclaré sera considéré comme ayant une activité occulte. 

Ce changement offre ainsi une véritable sécurité de ce point de vue. En revanche, en créant cette nouvelle catégorie de traders habituels, il est probable que les inspecteurs seront plus enclins à requalifier un trader occasionnel en habituel. 

L’application des BNC pour les traders habituels va également simplifier les contrôles dans la mesure où il sera possible de déterminer la base imposable à partir des relevés de comptes sans tenir compte des spécificités de la comptabilité d’engagement. 

En conclusion, si la volonté du législateur était initialement de clarifier la situation des contribuables réalisant des opérations en crypto, force est de constater que ce changement n’améliore qu’à la marge la situation de ces derniers. 

 

Tableau de synthèse :

 

Situation :

Trader occasionnel

Trader habituel

Trader professionnel

Régime fiscal : 

Plus-values des particuliers (art. 150 VH bis du CGI)

BNC

BIC

Règles de Comptabilité

Comptabilité de caisse

Comptabilité de caisse

Comptabilité d’engagement

Régime micro

N/A

Base : recettes brutes

Seuil : 77 700 € 

Abattement pour frais et charges : 34 %

Base : recettes brutes

Seuil : 188 700 €

Abattement pour frais et charges : 71 %

Fait générateur d’imposition

Retraits fiat

Toute opération de cession d’actifs numériques

Toute opération de cession d’actifs numériques

Taux d’imposition

12,8 %

Barème progressif de l’IR

Barème progressif de l’IR

Traitement des déficits

Utilisable l’année de réalisation sur les plus-values crypto

Reportable sur 6 ans sur les revenus de même nature

Imputable sur l’ensemble des autres revenus de l’année en cours et sur les 6 années qui suivent

Régime social

Prélèvements sociaux 17,2%

Prélèvements sociaux 17,2 %

Régime des Travailleurs non-salariés : 40% (grosse approximation)

Régime micro-social : 12,3 % 

Délai de reprise fiscal (prescription)

31 décembre de la 3e année suivant celle du fait générateur

31 décembre de la 3e année suivant celle du fait générateur

31 décembre de la 3e année suivant celle du fait générateur

Si activité occulte : 31 décembre de la 10e année suivant celle du fait générateur

Sanctions

Majoration de 40% des impôts éludés

Majoration de 40% des impôts éludés

Majoration de 40% des impôts éludés et 80 % en cas d’activité occulte


Découvrez la newsletter ComptaCrypto

Retrouvez l'essentiel de l'actualité cryptomonnaie en vous inscrivant à la newsletter ComptaCrypto